Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Voyages, bagages et nuages: le point de vue d'une hôtesse de l'air dans des grands oiseaux en fer.

21 Nov

10 ans dans les nuages

Publié par Plume  - Catégories :  #Ciel, #Listes

L'époque du chapeau rouge d'Emirates remonte déjà à quelques heures de vol.

Le fantasme collectif " Ouah super, tu vas à New York ! " équivaut exactement à dire " Quelle chance tu as d'aller travailler ! "

Don't get me wrong, i love my job.

 

Seulement voilà ma préoccupation principale n'est pas Quelle est ma prochaine escale soleil ? mais plutôt Comment survivre à ces six vols d'affilée, avec seulement deux jours de récupération entre chaque?

Afin d'être en aussi bon état au sol qu'en vol, l'heure est plutôt à la modération, voire au minimalisme. Les éléments essentiels auxquels je fais attention :

 

- Les bagages. Malgré ma collection impressionnante de valises - sans parler des sacs à dos de voyage - je prends presque toujours la même, une petite au format cabine. Même si je pars loin et longtemps, la priorité est de voyager léger. Pour les provinciaux, ça permet de gagner un temps précieux et la possibilité de voyager en jumpseat.

Ah oui, j'habite au cinquième étage. Sans ascenseur.

 

- Le type de vols. On peut en demander deux par mois ; souhaits soumis au bon vouloir de l'élaboration planning et de l'ancienneté dans la compagnie.

Certains demandent des escales qui payent : avec des indemnités élevées, ce qui relève également de la survie. Afin d'effectuer moins de vols j'en demande des longs - mais pas trop non plus faut pas exagérer. De préférence du même coté du globe, et s'ils se succèdent je reste au même fuseau horaire. Peu compatible avec un mode vie classique, les journées sont courtes quand elles commencent à midi.

 

- L'espace-temps. On va pas se mentir, l'avion c'est super mauvais il y a mieux pour la santé. Entre les nuits blanches, le jetlag et les rayons ionisants lors des passages par le pôle, notre capital points de vie en prend un sacré coup. J'essaie d'éviter les décalages horaires de l’extrême - Californie et Ouest Canadien, neuf heures de différence ! - et l'effet essuie-glaces (partir à Tokyo puis à San Francisco).


Je fais attention aux heures de décollage mais surtout d’atterrissage : après onze heures du matin, berkberk. En privilégiant de préférence des retours qui n’empiètent pas ou peu sur le week-end. Car c'est là que les gens vivent, par conséquent moi aussi, dans le but de ne pas perdre de vue

 

- La vraie vie. Bien sûr, je profite toujours des destinations pour faire un maximum de choses, car le temps sur place le permet amplement. Mais je compte les jours chez moi plutôt que ceux ailleurs, car aucune escale n'abrite famille et amis.

Avoir quelque chose de concret qui nous raccroche à la réalité permet également de ne pas devenir totalement maboul. Ça peut être n’importe quoi : un hobbie, une personne, un ficus. A défaut d'une raison de vivre, c'est toujours plus agréable d'avoir une motivation pour rentrer.

 

- Le port de l'uniforme. Un seul mot d'ordre : tout ce qui est Pratique, comme Pantalon. Inutile de parader en talons dans les transports en commun, encore moins si j’enchaîne en prenant un vol en direction du sud de la France. Attention il ne s'agit pas du tout d'être négligée, il ne faut pas qu'on vous confonde avec un passager !

Depuis que j'ai arrêté les allers-retours à Montpellier je me surprends même à porter des robes.

"Bin je suis à Paris, j'affirme à mon frère Florian, sceptique. Mais si je t'assure, il faut bien que j'habite quelque part !"

 

- Le temps de préparation. Il vaut mieux être ébouriffée à l'heure qu'éblouissante en retard. Je préfère filer à l'aéroport puis finir de me préparer devant un miroir de la cité Personnel Navigant. Coiffer des cheveux longs c'est long, mais depuis que la queue de cheval est autorisée je gagne dix bonnes minutes.

Il faut malheureusement parler du maquillage, qui en soi ne me dérange pas trop. Ce qui m'ennuie profondément, c'est le démaquillage, aussi fastidieux que l'enfilage de collants de contention. En vol, au-delà d'une heure de repos j'enlève tout, sinon au réveil on dirait un bébé chat atteint de conjonctivite.

Je vois lentement approcher le jour où je vais adopter la technique de certaines hôtesses : les paillettes. Il y a un côté Barbie mais au moins on a tout de suite l'air maquillée.

 

-La parole. Je vous vois venir, mais qu'est-ce qu'elle raconte ? Parler moins et mieux, car causer si personne ne vous entend, ça ne sert à rien !

- Tu me tues, me lance Wendy en plein service, hilare : tu dis juste "drinks ?"

Cuba version Caraibes Ocean Indien. La majorité des quatre cents trente passagers plongés dans leur film n'entendra que la fin dans tous les cas.

 

Pour préserver salive, fatigue mentale et donc capital sympathie, je fais retirer les casques afin de capter l'attention du maximum de personnes, et énonce toutes informations une fois sûre d'être écoutée.

 

L'opération sauvez ma voix intervint après un bref mais intense épisode de nodule aux cordes vocales : lassées de mon timbre rauque, les bonnes âmes attentives répétaient aux retardataires.

 

 

Par contre, on ne lésine pas sur : 

 

Brésil, 2019

La découverte. On a la chance de pouvoir pratiquement zapper le budget billets d'avion, partir sur un coup de tête ou changer de destination à la dernière minute si on embarque pas car le vol est plein. Malgré le côté aléatoire des tickets standby et les remontrances de ma grand-mère, je n'ai pas encore renoncé à prendre des longs courriers pendant mes congés sous prétexte que c'est mon travail.       

Surtout l'hiver, surtout pas pendant l'été ni les vacances scolaires. 

 

- L'anticipation. "J'ai mon briefing à midi mais je prends le premier avion à six heures du matin de Montpellier, peste Guillaume, c'est trop aléatoire avec tous ces vols annulés."

Quand je pense que je suis large, je prévois encore plus de marge. Être dans les temps c'est déjà la moitié du travail de fait.

 

La vigilance en matière de sûreté et sécurité. Tous responsables d'une porte et une zone de fouille, on compte les uns sur les autres sans oublier la conscience du risque et

 

- La bienveillance entre nous. La plupart des vols retours se font de nuit ; sauf en Asie mais avec le décalage le résultat est le même : on a pas dormi, ou au maximum quelques heures. Vous avez sûrement remarqué que lorsqu'on est épuisé tout devient pénible, il faut faire des efforts colossaux pour ne pas s'emporter au moindre accrochage. On associe la survie avec la sérénité, et si l'on se sent fatigué au point de piquer du nez pendant la garde il vaut mieux avertir les collègues.

 

- Ce que l'on offre aux clients. Jeux pour enfants, chocolats, boissons, trousses de confort et j'en passe. Ils sont la pour ça, ne sortent pas de votre poche et quand y a plus, y a plus. On fait juste attention à ne pas se servir dans la réserve destinée au vol retour.

 

- Le sourire. Pareil, ça ne coûte rien et c'est un cercle vertueux, si les voyageurs sont contents on l'est aussi, et ainsi de suite. Mine de rien, on est aussi là pour ça.

 

 

 

Dernier vol à Emirates, 2014

 

 

DUBAI, 2011
DUBAI, 2011
DUBAI, 2011
DUBAI, 2011
DUBAI, 2011

DUBAI, 2011

MELBOURNE, 2013

MELBOURNE, 2013

MANCHESTER, 2015
MANCHESTER, 2015
MANCHESTER, 2015
MANCHESTER, 2015
MANCHESTER, 2015

MANCHESTER, 2015

VIETNAM. CAP VERT, 2016
VIETNAM. CAP VERT, 2016

VIETNAM. CAP VERT, 2016

PARIS, 2017 - 2023
PARIS, 2017 - 2023
PARIS, 2017 - 2023
PARIS, 2017 - 2023
PARIS, 2017 - 2023
PARIS, 2017 - 2023
PARIS, 2017 - 2023

PARIS, 2017 - 2023

Commenter cet article

Archives

À propos

Voyages, bagages et nuages: le point de vue d'une hôtesse de l'air dans des grands oiseaux en fer.